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NORMESIAS-IFRS

Ce blog est destiné à expliquer et commenter certains projets en cours de l'IASB (normes financières et comptables internationales). Il s'adresse à la fois aux professionnels et aux étudiants. Il comporte aussi des cours et des cas-corrigés sur les IAS/IFRS et la comptabilité française.

IAS/IFRS, le gonflement des actifs ou du coût historique à la juste valeur intégrale (10)

IAS/IFRS, le gonflement des actifs ou du coût historique à la juste valeur intégrale (10)

 

IAS/IFRS, the inflating of the assets or from historical cost to global fair value

 

Par Bernard Chauveau

Maître de Conférences

CRECCI-IAE de Bordeaux IV et GREFIGE-CEREMO de Nancy2


 

Plan de l'article :

 

Introduction

Propos liminaires

1. L’évolution des normes de consolidation

                  1.1. Un périmètre de consolidation qui s’accroît

                  1.2. De la méthode d’intégration à la valeur comptable à celle à la juste valeur intégrale

2. L’évolution des actifs

                   2.1. La nature des actifs comptabilisables s’élargit

                   2.2. Le traitement des actifs corporels de production et des actifs incorporels

2.2.1. Les éléments corporels, une plate-forme presque stable

2.2.2. Les contrats de location orientés vers le droit d’usage

 

                   2.3. La valorisation des éléments acquis, produits ou échangés

                   2.4. Le plus visible, les actifs financiers

3. L’évolution de la définition " Dettes/capitaux propres "

Conclusion

Bibliographie

 

Nota : les caractères gras du plan correspondent à la partie traitée de l'article.

 

 


 

2.2.3. Des actifs incorporels qui croissent en importance et qui vieillissent de moins en moins

 

La première norme sur les éléments incorporels du bilan n’a été consacrée qu’aux frais de recherche et de développement (IAS 9 de 1978). Ils devaient normalement constituer des charges de l’exercice parce que leur lien avec des bénéfices futurs (§9) " est, s’il existe, ténu… ". Toutefois il restait possible (§10) de les inscrire à l’actif et de les amortir.

Dans le projet E32 de réduction des options puis le E37 de 1991, la reconnaissance à l’actif devient obligatoire, pour les seuls frais de développement, si les critères sont remplis, leur inscription en charges ne devant plus être admise. Cette solution est consacrée par la révision de l’IAS 9 en 1993.

Avec la publication, en 1994, d’un Draft Statement of Principles, puis d’un premier projet de norme E50 en 1995, l’IASB s’engage vers une normalisation des actifs incorporels qui exclut encore (§2) les frais de recherche et de développement et le goodwill qui continuent à être régis par les IAS 9 et 22. Les actifs incorporels y sont définis comme " a) utilisés dans la production ou de la fourniture de biens ou de services, pour la location à d’autres ou pour des besoins administratifs et b) dont on attend qu’ils soient utilisés sur plus d’une période ". Il faut remarquer une nuance qui n’est pas anodine entre les deux textes. Dans le Draft Statement of Principles ces actifs sont " détenus " (notion plutôt juridique), alors que dans le projet E50 ils sont " contrôlés ", ce qui en élargit le champ.

Deux autres critères seront également exigés : l’actif doit être identifiable et non monétaire, c’est-à-dire dénué de substance physique. Dans le Draft Statement of Principles, un actif est " identifiable " lorsqu’il découle (§24) d’un droit qui peut être légal ou non mais (§23), " cependant, en l’absence d’un droit légal, il peut être très difficile de démontrer l’existence d’un contrôle ". Une même référence aux droits est reprise dans le projet E50 (§13). Le projet E60 (§13), pour les actifs acquis, considère que le caractère identifiable est vérifié puisque les droits sont transférés. Pour ceux produits de manière interne ou provenant d’une opération de regroupement, le caractère identifiable est établi " lorsque les ressources économiques futures… peuvent être clairement distinguées de celles qui proviennent du goodwill ". " Cependant, … [ce] n’est pas une condition nécessaire … dans la mesure où l’entreprise est à même d’identifier l’actif par d’autres moyens " (§14). Ceci sera repris par l’IAS 38 révisée en 1998 (§10, §11 et §12), bien que la formulation soit légèrement différente.

Dans le second projet de norme E60 de 1997, la définition des actifs incorporels est largement modifiée pour reposer a) sur son caractère identifiable, b) son contrôle et c) l’existence de bénéfices futurs au profit de l’entreprise.

Dans la mesure où, par exception, les frais de R&D étaient immobilisés en conformité avec la première version de l’IAS 9 de 1978, ils étaient amortissables (§11) " en utilisant comme base soit les ventes ou l’utilisation du produit ou du procédé, soit un nombre raisonnable d’exercices ". Dans sa version révisée de 1993 (§23), alors que l’inscription à l’actif est devenue la règle, il est indiqué que "  … De plus, il est en général difficile d’estimer les coûts supplémentaires et les produits futurs correspondant à un nouveau produit ou procédé au-delà d’une courte période. Pour ces raisons, les coûts futurs et les frais de développement sont normalement amortis sur une période n’excédant pas cinq ans ". On peut noter que cette durée était conforme à celle prévue par l’article 37.1 de la quatrième directive 78/660/CEE.

Pour les autres immobilisations incorporelles, l’obligation d’amortir découlait simplement des dispositions générales de l’IAS 4 (Comptabilisation des amortissements) de 1976.

Avec la parution du Draft Statement of Principles de 1994, commencent à apparaître d’importantes nuances. On peut ainsi lire que (§109) " dans beaucoup de cas, la durée de vie utile d’un actif incorporel est déterminable, de ce fait, la période d’amortissement et la charge d’amortissement peuvent être mesurées de manière fiable " , à défaut (§111) "  … la période d’amortissement ne doit pas excéder cinq ans sauf si une plus longue période, n’excédent pas vingt ans à compter de la date de la comptabilisation initiale, peut se justifier ". L’évolution s’accentue encore avec le projet E50 où (§80) la durée d’amortissement devient " (a) la plus courte de la durée de vie utile et (b) de vingt ans à compter de la comptabilisation initiale ", le dépassement étant strictement encadré (§81) et réservé à des situations de protection légale. La version suivante, E60 (§68), assouplit encore la règle puisque le délai de 20 ans devient une " simple présomption " (§73). Cette solution est étendue à tous les actifs incorporels, même produits de manière interne (les frais de R &D), car, selon le Board, (E60, Appendix 3, §24) " …la vie utile d’un actif incorporel ne doit pas dépendre du fait qu’il est produit de manière interne ou acquis à l’extérieur ". Ces dispositions seront ensuite intégrées à la version définitive de l’IAS 38 de septembre 1998.

Bien qu’exceptionnelle, la possibilité d’échapper à l’amortissement est esquissée dans le Draft Statement of Principles de 1994 (§110) : " dans de rares circonstances un actif incorporel peut avoir une durée de vie infinie ou sa durée d’utilisation peut être si longue que cela rende la charge d’amortissement périodique non significative … et son amortissement n’est pas comptabilisé ". Cette avancée n’est toutefois pas reprise dans les projets E50 et E60. Et l’IAS 38 de 1998 précise même (§84) que " la vie utile d’un actif incorporel peut être très longue mais qu’elle est toujours finie ".

Telle n’est plus la conception du projet de 2002, puisqu’il distingue (§85) les actifs à durée " finie " et à durée " indéfinie ", l’amortissement ne s’appliquant plus qu’aux premiers. Cette solution est ensuite reprise dans l’IAS 38 révisé de mars 2004 (§88 et §89) mettant ainsi fin à la limite des vingt ans.

Avec les droits d’émission de gaz à effet de serre, l’IFRIC a tenté, vainement, de publier une interprétation temporaire. Dans son projet de 2003, il considère qu’ils répondent à la définition d’un actif du Framework. Mais, si on admet cette thèse, comment déterminer la nature de ceux-ci ? La solution retenue a été de les considérer comme des immobilisations incorporelles relevant de l’IAS 38, évaluables soit au coût (d’allocation ou d’achat), soit à la valeur réévaluée. D’autres solutions ont été avancées dans les Comment Letters, comme un stock (CNPF) sans possibilité de réévaluation, un instrument financier (South Africa Institute of Chartered Accountants) évalué alors à la juste valeur, des systèmes mixtes (immobilisations pour la part consommée, actifs financiers pour la part destinée à la cession)… Si l’interprétation a été annulée par décision du Board lors de son meeting de juin 2005, ce n’est pas à cause de la reconnaissance de ce nouvel actif, mais en raison d’un mode de comptabilisation très controversé et de son rejet par l’EFRAG. L’IFRIC n’a cependant pas abandonné le projet (IFRIC Update, juin 2005, p.1-2).

Une nouvelle " avancée comptable " a conduit, avec le projet IFRIC D1 de 2003 (§BC7), à considérer que ces droits ont une valeur résiduelle égale à leur juste valeur à leur entrée à l’actif et donc qu’ils ne sont pas amortissables. Une telle affirmation, contestée par de nombreux commentateurs (dont l’EFRAG), ignore le fait qu’à la fin de la période (3 ans dans la phase expérimentale, puis 5 ans) les droits non utilisés ou vendus sont annulés et qu’alors leur valeur résiduelle est nulle… Cette position est d’ailleurs remise en cause après l’annulation de l’IFRIC 3 en 2005.

2.2.3. Des actifs incorporels qui croissent en importance et qui vieillissent de moins en moins

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